Belgique - Cap Nord suite 10
LLN – Cap Nord Départ : 04/01/2022
J11 Trondheim (Nor) Moesjen (Nor) 14/01/2022
Quelle journée ! Jamais auparavant, je n’ai conduit dans de telles conditions tout au long d’une journée (de 8h45’) !
Je n’ai pas eu un instant de répit, je suis vanné.
Ce matin déjà, la pluie a cédé sa place à la neige, la température est de zéro degré. Mon side était sous abri, mais le vent est violent, quelques vagues de flocons dures et ronds s’y sont fait une place, en fines congères.
Le niveau d’huile est rectifié et je m’aperçois que le pneu arrière de la moto est quasi à plat… un mini-compresseur fiché dans sa prise 12V dédiée, le regonfle ; il était temps car il n’y restait qu’un kg et demi de pression. Je devrai le surveiller celui-là. J’espère que ce n’est pas un des spikes vissés qui a traversé… le bitume, tout ça.
A 8h30’, je prends la route sous un déluge de neige ; le vent est si fort que les flocons frappent à l’horizontale ; il en sera ainsi toute la journée.
Il fait nuit encore, le trafic à la sortie de Trondheim est intense, il faiblira une vingtaine de km plus loin.
Je longe la côte atlantique, puis pénètre dans les terres ; le long de l’océan, le vent n’est que bourrasques rageuses qui déstabilisent mon attelage à chaque changement de cap ; dans les terres, le vent est à peine moins violent, mais il fait un degré de moins et il neige davantage, de cette neige lourde qui colle à ma visière, et se met en tas le long des ornières laissées par les poids-lourds et les voitures.
L’écart entre les roues arrières du side, est de 1,1M, ce qui signifie que j’ai toujours une roue dans un tas de neige… c’est très fatigant car je dois sans cesse redresser l’attelage, en douceur qui plus est, au risque de partir en tête à queue.
Certains me diront : mets les deux roues dans la neige ! Non, car cette neige-là n’est pas assez gelée et les empreintes de la roue avant ne peuvent absorber cette mélasse.
Heureusement, il y a peu de trafic.
L’océan est furieux, de couleur du ciel, tantôt noir, tantôt saumon, tantôt gris, moutonné d’écume. A l’intérieur des terres, c’est la campagne que seuls les bâtis en bois peints – rouge foncé, beige, blanc – distinguent de la nôtre. Durant 100 km, telles resteront mes conditions et ma vitesse oscillera entre 50 et 65 km/h, je ne prends pas le risque de rouler plus vite.
A 11h, je fais le plein ; deux norvégiens viennent me trouver et me traitent de « crazy » quand je leur dis d’où je viens et où je me rends ; décidemment, ce doit être leur manière de prodiguer des encouragements, car ils le disent avec un sourire bienveillant.
Je ne m’attarde pas et j’ai raison car les conditions climatiques vont se dégrader encore.
Bientôt j’atteins les montagnes, la température ne perd qu’un degré (-2°), la mélasse gèle – c’est mieux – mais l’épaisseur de neige augmente, rendant l’efficacité des spikes insuffisante pour empêcher le dérapage…permanent.
Le vent est à décorner les bœufs, il y a dix à quinze centimètres de neige, celle-ci vole toujours à l’horizontale et, par-dessus le marché, il fait aussi sombre qu’à la tombée de la nuit ; je n’y vois rien, ça dandine du cul et de la neige s’insinue dans le haut de mon col, juste sous le casque.
Je m’accroche, décidé à enquiller les km’s, mais c’est à 45km/h que je parviens à maintenir ma machine sur sa bande de roulement.
Par intermittence, la neige s’interrompt, pas le vent qui m’accompagnera sans répit, et du coup, la visibilité s’améliore me permettant de mieux anticiper et d’« accélérer » de dix km/h.
La route sinue ainsi dans la montagne sans croiser un village pendant 120 km ; maintenant, je ne croise que quelques camions, très prévenants, mais leur sillage de neige volante m’aveugle pendant quelques secondes me donnant à chaque fois des sueurs froides, car mêmes les piquets rouges se dérobent à ma vue en ces circonstances.
Les arbres ont perdu leurs habits blancs, arrachés par les rafales; tout le reste est blanc et il me faut user d’une concentration de tous les instants pour rester sur la route.
J’essaie de me détendre pour soulager mes mains et mes épaules qui manoeuvrent sans cesse, mais aussitôt je dois reprendre l’effort pour redresser l’attelage. Ma crainte est de ne pas voir une congère à droite et que la roue du panier s’y plonge ; si cela devait arriver, j’irais au fossé illico. Et ça, vous l’aurez compris, je veux l’éviter à tout prix.
Il est 13h30’ et décide de m’arrêter pour mon, désormais rituel, déjeuner ; un suisse m’aborde, il vient du Cap Nord. Il y fait très, très mauvais temps, me dit-il. Il l’a testé en Audi E-Tron.
En Norvège, il peut s’y essayer vu le nombre important de stations de recharge, je lui déconseille de le tenter partout ailleurs en de pareilles conditions!
Je nettoie mes feux recouverts de deux cm de neige ; je roule tous phares allumés depuis ce matin et régulièrement, je dois y passer. C’est le désavantage des feux à Led, ils ne chauffent pas et se recouvrent donc facilement de neige, ce qui n’est pas le cas avec des ampoules, bien nommées, à incandescence.
Dès 15h, la nuit est tombée et ma visibilité pâtit des phares venus de face ; elle était déjà mauvaise, mais là, je me dis qu’il faut que je m’arrête car la limite du raisonnable, de mon raisonnable en fonction de mes capacités de pilotage et de vue, sont atteintes. Je ne dépasse plus le 45 km/h et cherche un hôtel.
Il me faudra encore rouler deux heures avant d’en trouver un, à Moesjen ; j’aurai parcouru 410 km.
La moto a fonctionné du tonnerre, un vrai plaisir si ce n’était ces conditions dantesques.
Bonne nouvelle ! Depuis ce jour, l’Horeca norvégien peut à nouveau servir vins et bières !!
Installé, douché, je me rends dans le premier pub venu et m’offre mon morceau de viande hebdomadaire, avec un verre de vin rouge, un dessert et un déca ! la totale !
On n’a que le bien que l’on se fait, n’est-il pas ?
Arriverai-je à temps à Tromso ? C’est la question. La météo reste calamiteuse et je ne pourrai donc pas faire plus de km’s demain que je n’en ai parcourus aujourd’hui ; mais, je pense que j’arriverai dimanche vers midi.
Assez tôt pour les voir, déjeuner avec elles (?), trop tard pour réellement passer du temps ensemble.
Ainsi vont les choses; à l’impossible, nul n’est tenu.
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Quelle journée ! Jamais auparavant, je n’ai conduit dans de telles conditions tout au long d’une journée (de 8h45’) !
Je n’ai pas eu un instant de répit, je suis vanné.
Ce matin déjà, la pluie a cédé sa place à la neige, la température est de zéro degré. Mon side était sous abri, mais le vent est violent, quelques vagues de flocons dures et ronds s’y sont fait une place, en fines congères.
Le niveau d’huile est rectifié et je m’aperçois que le pneu arrière de la moto est quasi à plat… un mini-compresseur fiché dans sa prise 12V dédiée, le regonfle ; il était temps car il n’y restait qu’un kg et demi de pression. Je devrai le surveiller celui-là. J’espère que ce n’est pas un des spikes vissés qui a traversé… le bitume, tout ça.
A 8h30’, je prends la route sous un déluge de neige ; le vent est si fort que les flocons frappent à l’horizontale ; il en sera ainsi toute la journée.
Il fait nuit encore, le trafic à la sortie de Trondheim est intense, il faiblira une vingtaine de km plus loin.
Je longe la côte atlantique, puis pénètre dans les terres ; le long de l’océan, le vent n’est que bourrasques rageuses qui déstabilisent mon attelage à chaque changement de cap ; dans les terres, le vent est à peine moins violent, mais il fait un degré de moins et il neige davantage, de cette neige lourde qui colle à ma visière, et se met en tas le long des ornières laissées par les poids-lourds et les voitures.
L’écart entre les roues arrières du side, est de 1,1M, ce qui signifie que j’ai toujours une roue dans un tas de neige… c’est très fatigant car je dois sans cesse redresser l’attelage, en douceur qui plus est, au risque de partir en tête à queue.
Certains me diront : mets les deux roues dans la neige ! Non, car cette neige-là n’est pas assez gelée et les empreintes de la roue avant ne peuvent absorber cette mélasse.
Heureusement, il y a peu de trafic.
L’océan est furieux, de couleur du ciel, tantôt noir, tantôt saumon, tantôt gris, moutonné d’écume. A l’intérieur des terres, c’est la campagne que seuls les bâtis en bois peints – rouge foncé, beige, blanc – distinguent de la nôtre. Durant 100 km, telles resteront mes conditions et ma vitesse oscillera entre 50 et 65 km/h, je ne prends pas le risque de rouler plus vite.
A 11h, je fais le plein ; deux norvégiens viennent me trouver et me traitent de « crazy » quand je leur dis d’où je viens et où je me rends ; décidemment, ce doit être leur manière de prodiguer des encouragements, car ils le disent avec un sourire bienveillant.
Je ne m’attarde pas et j’ai raison car les conditions climatiques vont se dégrader encore.
Bientôt j’atteins les montagnes, la température ne perd qu’un degré (-2°), la mélasse gèle – c’est mieux – mais l’épaisseur de neige augmente, rendant l’efficacité des spikes insuffisante pour empêcher le dérapage…permanent.
Le vent est à décorner les bœufs, il y a dix à quinze centimètres de neige, celle-ci vole toujours à l’horizontale et, par-dessus le marché, il fait aussi sombre qu’à la tombée de la nuit ; je n’y vois rien, ça dandine du cul et de la neige s’insinue dans le haut de mon col, juste sous le casque.
Je m’accroche, décidé à enquiller les km’s, mais c’est à 45km/h que je parviens à maintenir ma machine sur sa bande de roulement.
Par intermittence, la neige s’interrompt, pas le vent qui m’accompagnera sans répit, et du coup, la visibilité s’améliore me permettant de mieux anticiper et d’« accélérer » de dix km/h.
La route sinue ainsi dans la montagne sans croiser un village pendant 120 km ; maintenant, je ne croise que quelques camions, très prévenants, mais leur sillage de neige volante m’aveugle pendant quelques secondes me donnant à chaque fois des sueurs froides, car mêmes les piquets rouges se dérobent à ma vue en ces circonstances.
Les arbres ont perdu leurs habits blancs, arrachés par les rafales; tout le reste est blanc et il me faut user d’une concentration de tous les instants pour rester sur la route.
J’essaie de me détendre pour soulager mes mains et mes épaules qui manoeuvrent sans cesse, mais aussitôt je dois reprendre l’effort pour redresser l’attelage. Ma crainte est de ne pas voir une congère à droite et que la roue du panier s’y plonge ; si cela devait arriver, j’irais au fossé illico. Et ça, vous l’aurez compris, je veux l’éviter à tout prix.
Il est 13h30’ et décide de m’arrêter pour mon, désormais rituel, déjeuner ; un suisse m’aborde, il vient du Cap Nord. Il y fait très, très mauvais temps, me dit-il. Il l’a testé en Audi E-Tron.
En Norvège, il peut s’y essayer vu le nombre important de stations de recharge, je lui déconseille de le tenter partout ailleurs en de pareilles conditions!
Je nettoie mes feux recouverts de deux cm de neige ; je roule tous phares allumés depuis ce matin et régulièrement, je dois y passer. C’est le désavantage des feux à Led, ils ne chauffent pas et se recouvrent donc facilement de neige, ce qui n’est pas le cas avec des ampoules, bien nommées, à incandescence.
Dès 15h, la nuit est tombée et ma visibilité pâtit des phares venus de face ; elle était déjà mauvaise, mais là, je me dis qu’il faut que je m’arrête car la limite du raisonnable, de mon raisonnable en fonction de mes capacités de pilotage et de vue, sont atteintes. Je ne dépasse plus le 45 km/h et cherche un hôtel.
Il me faudra encore rouler deux heures avant d’en trouver un, à Moesjen ; j’aurai parcouru 410 km.
La moto a fonctionné du tonnerre, un vrai plaisir si ce n’était ces conditions dantesques.
Bonne nouvelle ! Depuis ce jour, l’Horeca norvégien peut à nouveau servir vins et bières !!
Installé, douché, je me rends dans le premier pub venu et m’offre mon morceau de viande hebdomadaire, avec un verre de vin rouge, un dessert et un déca ! la totale !
On n’a que le bien que l’on se fait, n’est-il pas ?
Arriverai-je à temps à Tromso ? C’est la question. La météo reste calamiteuse et je ne pourrai donc pas faire plus de km’s demain que je n’en ai parcourus aujourd’hui ; mais, je pense que j’arriverai dimanche vers midi.
Assez tôt pour les voir, déjeuner avec elles (?), trop tard pour réellement passer du temps ensemble.
Ainsi vont les choses; à l’impossible, nul n’est tenu.
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