LLN – Afrique

16/01/2025      St Louis -> Dakar        240 km

Préambule :

Vous aurez remarqué mon « silence » durant ces 11 derniers jours ; j’étais sans ordinateur, hospitalisé.

Aujourd’hui, sorti et logeant chez l’habitant dans un petit appartement au deuxième étage, je suis en convalescence encore et ne pourrai prendre l’avion que dans une semaine, à peu près.

Je reprends l’écriture pour l’étape qui m’a mené à Dakar et… à l’hosto.

Compte-rendu de la journée du 16 janvier dernier :

Dernière nuit passée au Zebra Bar, je me lève dès que le soleil perce pour démonter mon petit campement et ranger mon barda dans le sidecar. Ensuite, douche et petit-déjeuner avec Thomas, un belge se rendant en Gambie à vélo et rencontré la veille lors d’un dîner « de gala », entendez un BBQ avec buffet d’accompagnements de toutes sortes, de grande qualité.

Je paie ma note et à 9h30’, je prends la route. Celle-ci s’annonce facile, le parcours est bitumé, je longerai la côte, c’est plat comme la main. Il fait beau, pas encore trop chaud… tout ça va changer !

Si les premiers 60 km s’avalent sans souci, les premières traversées de village sont pénibles ; tout est embouteillé, l’indiscipline est la règle, la route en ces villages est défoncée.

A midi, la température est montée à 40°C, et les traversées de villages se suivent, et se ressemblent !, de plus en plus fréquemment, me contraignant à des « vitesses » de 5 à 10km/h ! .

Et le soleil tape dur. Toutes les heures, je m’arrête pour boire, mais renonce à manger car je vois les heures défiler bien plus rapidement que les km’s.

Dans la traversée de Mboro, je me rends compte que le moteur ne tourne que sur un cylindre lorsque les gaz sont faiblement ouverts ; faudra que je m’arrête dès que je serai sorti de l’ « enfer » de ce souk géant qui envahit la route ; il faut serpenter entre les étals, les bêtes, les badauds, les nids d’autruche et cela fait un moment que je ne sais plus comment m’asseoir sur la selle tant j’ai mal au cul !

Et puis, un POF sonore suivi d’un bruit d’aspiration m’impose un arrêt immédiat en pleine tourmente ; je me gare tant bien que mal entre deux étals et ausculte le moteur : pipe d’admission cyl gauche sortie du cylindre. Pas grave, j’ouvre ma boîte à outils, tournevis avec embout de sept et je remets tout en place en ayant d’abord desserré les autres empiècements d’admission d’air jusqu’au coude distributeur ; je resserre le tout en partant du cylindre. Je prends mon savon, lave mes mains au jerrycan d’eau sur l’arrière droit – les commerçants se marrent en voyant ma petite installation – et repars. Aah, ça tourne nettement mieux !

Je m’extraie enfin après une heure de cet imbroglio inimaginable ; je commence à m’inquiéter à une double enseigne ; d’abord, à quelle heure vais-je arriver à Dakar car j’avance encore moins « vite » qu’avant maintenant qu’une file de 400m de camions se traîne devant moi, et, ensuite, mon mal au cul irise dans tout mon corps que je sois assis ou debout sur les repose-pieds.

Jusqu’à Dakar où j’arrive vers 19h30’ – 10h pour parcourir 240km !! – ce sera le même scenario.

Je trouve sans trop de difficulté la maison de la famille Diack et m’installe au dernier étage de la maison dans un petit appartement bien aménagé, propre offrant une chambre, un salon, une salle de douche et une petite cuisine sur le palier ; la moto est dans le garage.

Je vous la fais courte, mais la torture – le mot n’est pas trop fort – que m’inflige mon anus me vrille toute la soirée et la nuit ; au matin, ayant tout essayé de ce que j’ai appris à l’armée – l’esprit domine le physique – je suis épuisé par la douleur permanente et de haute intensité.

Rien ne me soulage, quelque soit la position, même les bains de siège d’eau froide, même les efforts de concentration sur un d’autres sujets que la douleur ; je crève de mal ! Et n’ai plus rien mangé depuis hier matin.

A 14h, je rends les armes et préviens mon hôte que je vais à l’hôpital en lui expliquant en deux mots ce qui m’arrive ; sur ces entre-faits, j’ai pris contact avec mon assurance soins/rapatriement qui m’a indiqué le seul hôpital agréé, à savoir la Clinique de la Madeleine.

Mr Diack se propose de m’y déposer, voyant, je pense, que je suis à bout ; grâce lui soit rendu pour ce geste !

A l’arrivée une urgentiste me reçoit et m’hospitalise illico ; les anti-douleurs en intraveineuse agissent assez vite et à 17h, un gastro-entérologue vient m’ausculter.

La suite est simple, trois jours de soins pré-opératoires, opération le mardi 21 et puis, récupération qui se passe plus ou moins bien car j’ai fait une réaction à un des médicaments administrés. J’ai pu sortir le samedi 25.

Depuis, je suis à nouveaux chez les Diacks ; j’en ai pour une semaine, dix jours avant de pouvoir prendre l’avion. Je rentrerai au plus tôt près des miens qui m’attendent.

Dans un bon mois, je pourrai me pencher sur le schipping ou par fret aérien de la moto, car, oui, je vais interrompre ce voyage.

Cette décision provient du constat que le « couple » sidecar Ural/Pierre VdM n’est pas adapté aux pistes africaines et son climat chaud.

Le side ne bénéficie pas de débattement de suspension permettant de circuler sereinement sur ces pistes et moi, je n’ai probablement plus la santé suffisante pour encaisser tous les efforts nécessaires à avancer au long cours dans ces conditions.

C’est un coup dur pour moi ; c’est la première fois que mon corps me trahit, passant au-dessus de ma volonté.

 Je vais devoir tenir compte de ce constat et envisager la suite à cet aune. Il me faut du temps pour cela, le temps d’analyser, d’accepter celui que je suis devenu et puis, de rebâtir des projets adaptés à cette réalité.

On peut appeler cela vieillir aussi.

Merci pour les messages inquiets, pour les encouragements.

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                                                                    La maison Diack

Commentaires

  1. Merci d'avoir répondu à notre inquiétude. Tu ne pouvais pas faire autrement. Nous sommes rassurés. Tu as pris les bonnes décisions, pour ne pas imposer à ton corps d'autres souffrances inutiles. L'urgence est de prendre soin de toi. Bravo pour ton courage. Et bientôt, tu pourras rebondir sur d'autres projets possibles et inattendus!

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  2. Enfin, on comprend mieux le grand silence. Surtout bon rétablissement!

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  3. Mince, on avait raison de se faire du souci ! Mais bravo pour ta réaction pleine de sagesse : si on n'est pas capable de modifier un projet en fction des évènements c'est que les cheveux ont poussé à la place du cerveau!
    On te souhaite de te refaire bien vite en vue d'autres projets.
    Bon courage !

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  4. Mon Cher Pierre, cette porte fut passée pour moi voici deux ans au nord Cercle Polaire, où mes neurones du cervelet ont décidé de danser le twist. Coupure nette, ligne de vie brisée mais je crois que c'est un passage obligé pour les dingues.
    Pierre, on doit nous arrêter car de nous-même nous ne nous arrêterions pas...Ne t'inquiète pas, il y a un après...on en reparle quand tu passes et le courage est dans cette solitude. Je t'embrasse !

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    1. Mon Cher Pierre, comment fais-tu avec ton attelage ? Est-ce que tu ne souffres pas trop ? Ici on t'embrasse !

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  5. Pierre:
    " Ne soit pas triste de ce que la vieillesse t'enlève, réjouis toi de ce qu'elle te laisse"

    Amitiés, Laurent

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  6. Salut Pierre ,malgré cela tu as fait beaucoup plus que la majorité de sidecariste et c est cela qu il faut retenir ;parfois ,contourner l obstacle permet tout simplement de pouvoir continuer ;à bientot j espère

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